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Droit de manifester de manière non déclarée : Amnesty International recadre Gérald Darmanin

L'ONG Amnesty International a interpellé le 23 mars le ministre l'Intérieur Gérald Darmanin en rappelant qu'être dans une manifestation non déclarée n'était pas un délit, comme il l'affirme, au regard du droit international.

L’Organisation non gouvernementale Amnesty International, qui s’exprime régulièrement sur la répression des manifestations contre la réforme des retraites ces derniers jours, a commenté le 23 mars une déclaration du ministre français de l’Intérieur qui a affirmé qu’«être dans une manifestation non déclarée [était] un délit et mérite une interpellation».

«C’est FAUX», répond l’ONG en lettres capitales. «Le droit international est clair : manifester pacifiquement ne doit pas être soumis à une autorisation préalable. Ne pas déclarer une manifestation ne la rend pas illégale. Les manifestations spontanées doivent être présumées légales et ne doivent pas être soumises à dispersion», explique Amnesty International.

L’ONG déplore à cet égard le fait qu’en France les organisateurs d’une manifestation doivent demander une autorisation aux autorités entre trois et 15 jours à l’avance et que s’ils ne se soumettent pas à cette obligation, ils risquent une peine de prison ou une amende. «C’est CONTRAIRE au droit international», s’insurge Amnesty. «Les manifestants pacifiques participant à des rassemblements non déclarés ne commettent aucun délit. Ils ne peuvent donc pas être interpellés, contrairement à ce que déclare Gérald Darmanin. Ce point a été rappelé par la Cour de cassation en juin 2022», rappelle l’ONG qui demande la révision des dispositions du code pénal pour préciser qu’un rassemblement public non déclaré ne menace pas nécessairement l’ordre public. 

«Cela fait plusieurs années que nous appelons les autorités françaises à abroger toutes les lois contraires au droit international utilisées en France comme moyens de répression contre des manifestants pacifiques», insiste-t-elle.

Gérald Darmanin n’évoque pas le nombre de blessés parmi les manifestants

De nombreuses violences et des heurts avec les forces de l’ordre ont émaillé les manifestations contre la réforme des retraites le 23 mars en France. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a fait état de «457 interpellations» et de «441 policiers et gendarmes blessés» en France lors de la 9e journée de mobilisation. Il n’a cependant pas précisé combien de manifestants avaient été blessés alors que les images de ce violences sont légion sur les réseaux sociaux. 

11 enquêtes judiciaires ont été confiées à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) depuis une semaine dans le cadre de la mobilisation contre la réforme contestée des retraites, a néanmoins annoncé Gérald Darmanin. «Il se peut que, individuellement, les policiers et les gendarmes, souvent sous le coup de la fatigue, commettent des actes qui ne sont pas conformes à ce qu’on leur a appris à l’entraînement et à la déontologie», a-t-il concédé, appelant «dans ces cas-là [à] les sanctionner». Au moins trois enquêtes pour violences par personne dépositaire de l’autorité publique ont été ouvertes par le parquet de Paris, selon une source proche du dossier, rapporte l’AFP.

L’une d’entre elles a été ouverte à la suite du dépôt de plainte de la mère de Fanny, une lycéenne de 15 ans qui a reçu un projectile, qu’elle pense être un éclat de grenade de désencerclement, sur le front, lors d’une manifestation le 11 mars près de la place de la Bastille. Sa blessure lui a valu trois jours d’incapacité totale de travail (ITT). Une autre enquête a été ouverte après la plainte d’une femme qui a reçu un coup de matraque lors d’un rassemblement spontané le 20 mars dans le quartier de Châtelet. Selon la vidéo des faits réalisée par un reporter indépendant et mise en ligne sur les réseaux sociaux, la plaignante a reçu un coup de matraque de la part d’un policier casqué, alors qu’elle semblait immobile, coincée contre un mur avec d’autres personnes. Une troisième enquête vise un coup de poing qu’a asséné un policier au visage d’un manifestant le 20 mars au soir à Paris, capté par une vidéo largement relayée sur internet.

En janvier, une première enquête avait été ouverte après qu’un policier a donné un coup de matraque à un homme de 26 ans, qui a dû être ensuite amputé d’un testicule, lors de la première journée de mobilisation, le 19 janvier.

La justice n’est pas «au service de la répression du mouvement social»

Le ministre n’a pas non plus précisé combien de personnes avaient été poursuivies. A titre d’exemple, dans la nuit du 16 au 17 mars, 292 personnes avaient été interpellées en marge d’un rassemblement contre la réforme des retraites, donnant lieu à 283 classements sans suite. Une situation qui avait poussé le Syndicat de la magistrature à réagir pour souligner que l’autorité judiciaire n’était pas «au service de la répression du mouvement social». «Jouer pleinement notre rôle doit nous conduire à refuser le détournement de la procédure pénale au profit du maintien de l’ordre, à refuser de donner un vernis judiciaire à des opérations de police qui ne sont plus au service de la protection de la population mais de sa répression», a écrit le syndicat le 20 mars dans un communiqué.




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