Une enquête du Guardian révèle comment les trafiquants de cocaïne européens exploitent des mineurs isolés, algériens et marocains, notamment en France, en Belgique et aux Pays-Bas. Il s’agit de jeunes migrants abandonnés à leur sort, dont la majorité a rejoint l’Europe dans des traversées clandestines de la Méditerranée.
« Maltraités », « battus », et même « violés » et « torturés » : de plus en plus de mineurs isolés nord-africains sont exploités par les trafiquants de drogue européens, qui font appel à ces jeunes migrants algériens et marocains pour faire prospérer leurs affaires, notamment à Bruxelles et Paris, a révélé une récente enquête du journal britannique The Guardian.
Selon cette enquête, plusieurs centaines de mineurs non accompagnés seraient déjà victimes de « violences » et de « viols collectifs », parfois filmés, pour les contraindre à vendre de la drogue. D’autres seraient mêmes recrutés pour aller attaquer ou intimider les gangs rivaux.
L’enquête du tabloïd britannique a révélé que ces pratiques très graves sont monnaie courante, notamment en Belgique, aux Pays-Bas, en Espagne et en France.
Grave phénomène en Belgique, aux Pays-Bas, en France…
À Paris, six Algériens ont été condamnés en janvier dernier pour traite d’êtres humains après avoir enrôlé de jeunes Marocains dans le but de leur faire trafiquer de la drogue et commettre des vols avec violence. Ils repéraient d’abord les mineurs sur le Champ-de-Mars avant de tisser un lien de confiance en leur parlant arabe, puis en les rendant accros à différents psychotropes.
Aux Pays-Bas, le gang redouté Mocro Maffia règne sur le trafic de cocaïne qui transite par le port d’Anvers. Il revendique fièrement son origine marocaine et n’hésite pas à instrumentaliser les jeunes Marocains qui rêvent d’Europe, quitte à les recruter via les réseaux sociaux.
« La Mocro Maffia sait qu’elle dispose, dans son pays d’origine, de ressources humaines illimitées », a déclaré une source policière belge au Guardian.Selon le journal anglais, le gang utilise les mineurs isolés comme main d’œuvre à bas coût.
En Belgique, l’année dernière, la police a orienté 623 mineurs non accompagnés marocains et algériens vers les services de protection de l’enfance de Bruxelles.
Main-d’œuvre mineure et vulnérable
Ce grave phénomène serait « en train de s’exporter en Angleterre », avertit le quotidien britannique. « La police a récemment découvert un certain nombre d’enfants marocains et algériens, apparemment victimes de torture, qui, selon eux, ont été introduits dans le pays par des gangs de cocaïne », rapporte le journal.
En 2023, relate encore The Guardian, la police anglaise avait fait état de la disparition de 136 enfants d’un hôtel de Brighton où ils étaient hébergés. Après enquête, les forces de l’ordre avait découvert qu’une grande partie avait été enlevés par des gangs criminels albanais et érythréens pour faire passer de la drogue.
Avec plus de 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel en Europe, selon un rapport d’Europol cité par The Guardian, le trafic de cocaïne est en pleine expansion.
« Offre illimitée »
A en croire l’enquête, les services de renseignement de la police britannique identifient une offre « illimitée » de main-d’œuvre enfantine vulnérable, acheminée depuis l’Afrique du Nord pour travailler dans les réseaux de cocaïne les plus importants d’Europe.
Rien qu’en France, on comptait en 2022 environ 15 000 mineurs non accompagnés, selon les chiffres de la Protection judiciaire de la jeunesse. Si la majeure partie vient d’Afrique de l’Ouest (Guinée, Côte d’Ivoire, Mali), environ 20% est originaire de Tunisie, d’Algérie et du Maroc.
Ce sont ces jeunes migrants, dont la majorité a rejoint l’Europe dans des traversées clandestines de la Méditerranée à bord d’embarcations de fortune, qui sont les plus susceptibles d’être enrôlés par les trafiquants de drogue.
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