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Gaza : l’Egypte face au dilemme de l’accueil des réfugiés menacés par les bombardements

Alors que l'armée israélienne a demandé à la population de la province nord de Gaza de fuir vers le sud, tous les regards se portent vers Le Caire. L'Egypte va-t-elle ouvrir le poste-frontière de Rafah ? Le président Sissi martèle que les habitants de l'enclave doivent «rester sur leur terre».

L’Egypte, seule ouverture sur le monde de Gaza depuis qu’Israël a décrété un «siège complet» de l’enclave palestinienne, est devant un dilemme : ouvrir sa frontière aux Palestiniens, en risquant qu’Israël ne les laisse jamais revenir, ou les laisser sous les bombes israéliennes.

Dans la bande de Gaza, d’où le mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir, a lancé le 7 octobre une attaque meurtrière contre Israël, déclenchant une guerre qui a déjà fait des milliers de morts, la question de l’exil est une plaie à vif.

«Une seconde Nakba»

Plus de 80% des 2,4 millions d’habitants qui s’y entassent sont des réfugiés, chassés à la création d’Israël en 1948. La perspective de quitter de nouveau une terre palestinienne, qui pourrait être prise par l’armée israélienne, n’apparaît alors pas comme une option. «On va rester, on ne partira pas», lançait ainsi à l’AFP le 12 octobre Jamal al-Masri, un habitant dont la maison située dans le camp d’Al-Shati, le plus grand de la bande de Gaza, venait d’être détruite par une frappe.

«Le peuple palestinien s’est exilé une fois et il ne recommencera pas, le départ vers le Sinaï est une belle illusion», a renchéri sur une télévision arabe Mohammed Dahlane, politicien gazaoui installé dans le Golfe.

Mais si les habitants de Gaza ne se pressent pas au poste-frontière de Rafah – actuellement fermé après trois bombardements israéliens –, des voix demandent à l’Egypte d’accueillir des réfugiés. Le pays se targue de longue date de ne jamais monter de camps de tentes, faisant valoir que les neuf millions de Syriens, Irakiens et autres Soudanais qu’il accueille peuvent travailler et étudier comme les citoyens égyptiens.

Si les habitants du nord de Gaza, à qui Israël a demandé ce 13 octobre de gagner le sud de l’enclave – plus d’un million de personnes –, quittaient le territoire, ce serait déjà beaucoup plus que les quelque 760 000 réfugiés de la «Nakba» de 1948, la «catastrophe» qu’a représentée pour les Palestiniens la création d’Israël. Ce 13 octobre, le président palestinien Mahmoud Abbas a déjà parlé d’«une seconde Nakba», la Ligue arabe fustigeant un «transfert forcé». Le Hamas a quant à lui rejeté l’appel à évacuer. La veille, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi avait martelé que les habitants de Gaza devaient «rester sur leur terre». 

La peur du scénario de 2008 pour Le Caire

La question palestinienne «est la cause de tous les Arabes et c’est important que le peuple qui l’incarne reste inébranlable», a-t-il déclaré, après avoir répété depuis le début du conflit qu’il se préoccupait «avant toute chose de la sécurité nationale», une allusion au fait que des combattants du Hamas pourraient se glisser parmi les réfugiés.

Le roi Abdallah II de Jordanie a pour sa part affirmé le 13 octobre qu’il refusait «l’exportation de la crise aux pays voisins et l’aggravation de la question des réfugiés» palestiniens, qui sont déjà près de six millions dans le monde, dont un tiers en Jordanie.


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La priorité de l’Egypte et de la Jordanie est donc uniquement de rassembler de l’aide humanitaire pour Gaza, répètent dans ces deux pays les médias. Pour le gouvernement égyptien, le souvenir de janvier 2008 reste cuisant, au début du blocus israélien de l’enclave. Des milliers de Palestiniens avaient alors forcé la frontière, des militants du Hamas ouvrant au bulldozer de nouvelles brèches dans le mur frontalier à chaque tentative égyptienne de reprendre le contrôle.

Depuis ces opérations de «contre-terrorisme», personne ne peut circuler dans la région sans montrer patte blanche aux nombreux check-points. Et en lieu et place des maisons rasées, les autorités ont construit une «Nouvelle Rafah», aujourd’hui encore inhabitée.

Dans le Nord-Sinaï, certains estiment que ces immeubles vides pourraient accueillir les réfugiés palestiniens. Mais ce serait faire le jeu des islamistes, objectent à l’unisson les animateurs des talk-shows pro-Sissi. 

La «cause palestienne» survivra-t-elle à un exode massif ?

Si l’armée – avec à sa tête celui qui était encore le maréchal Sissi – a renversé le président issu des Frères musulmans Mohamed Morsi en 2013, c’est parce que ce dernier «voulait donner aux Gazaouis une partie du Sinaï et les déplacer», soulignait encore le 11 octobre l’animateur Youssef al-Husseini.

Au-delà de la question sécuritaire, l’Université d’Al-Azhar, la plus haute institution de l’islam sunnite, s’est invitée dans le débat. «Il est meilleur de mourir en héros et en martyr sur sa terre plutôt que de l’abandonner aux usurpateurs colonialistes», a-t-elle affirmé dans un communiqué, largement relayé sur les réseaux sociaux palestiniens. «Si vous quittez votre terre, votre cause et notre cause disparaîtront à jamais», a-t-elle mis en garde.




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