Le recteur de la Grande mosquée de Paris a lancé ce 3 juillet un appel aux autres cultes à «ne pas se tromper de combat» et à ne pas faire du musulman «un ennemi», les exhortant à faire barrage au Rassemblement national. Des propos qui s'inscrivent aussi dans un contexte d'importation latente du conflit de Gaza en France.
«Nous nous dressons contre une idéologie contraire aux plus grandes valeurs républicaines dans lesquelles nous, musulmans, nous nous retrouvons pleinement», a lancé ce 3 juillet le recteur de la Grande mosquée de Paris Chems-Eddine Hafiz, à quatre jours du second tour des élections législatives.
Exhortant ses interlocuteurs à ne pas laisser «les démons de la haine irrationnelle nous diviser», il a appelé «toutes les institutions religieuses de tous les cultes à s’affirmer contre la montée de l’extrême droite». Et de poursuivre : «Nous leur disons de ne pas hésiter, de ne pas se tromper de combat.»
«Nous ne faisons pas de politique, nous nous dressons contre un péril qui nous concerne tous», a-t-il ensuite justifié, rappelant qu’il lançait cet appel au sein de la Grande mosquée, «qui fut bâtie par la volonté de la République française pour honorer les sacrifices des milliers de musulmans morts pour la patrie» et qui fut «un lieu de sauvetage de nombreux juifs durant la Seconde Guerre mondiale».
«Je m’adresse à mes compatriotes juifs»
«Je m’adresse à mes compatriotes juifs, à mes amis, mes voisins et au-delà : l’ennemi n’est pas le musulman», a aussi écrit le recteur dans un communiqué publié sur le site internet de la Grande mosquée.
Car le contexte législatif se double de craintes d’antisémitisme du fait du conflit à Gaza, craintes que Chems-Eddine Hafiz voudrait dissiper : «Si l’antisémitisme est une réalité, il n’est pas l’apanage des musulmans, tout comme l’islamophobie n’est pas l’apanage des juifs.»
Le recteur a évoqué le rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) sur le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie en France, publié le 27 juin dernier et qui dénonçait un «recul de la tolérance et une très forte augmentation des actes racistes », principalement depuis le 7 octobre. Le rapport indique une augmentation de 284% de «faits antisémites» et de 29% de faits antimusulmans (respectivement 1676 et 242 en 2023).
Dans ce rapport, des chercheurs cités relèvent un «antisémitisme à gauche, tout particulièrement à la gauche de la gauche, chez les proches des Insoumis et d’EELV notamment», mais accusent surtout le RN. Selon eux, ce niveau d’antisémitisme serait «sans comparaison avec celui observé à l’extrême droite et chez les proches du Rassemblement national».
La communauté juive semble hésiter
«Le conflit israélo-palestinien fausse le débat, mais je vous le dis, l’avenir de la France ne doit pas se jouer au Proche-Orient», a fait valoir le recteur, souhaitant réorienter le débat sur les législatives.
Or, la position de la communauté juive, dans ce double contexte français et de guerre à Gaza, est incertaine. Le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) a appelé le 2 juillet à «battre le RN sans compromission avec LFI», la formation de Jean-Luc Mélenchon se voyant accusée de «provocations antisémites».
L’historien et avocat juif Serge Klarsfeld, figure de l’antinazisme, a quant à lui semé le trouble le 15 juin sur LCI, indiquant qu’il n’aurait «aucune hésitation» à voter pour le RN en cas de second tour opposant le RN à LFI.
Le parti de Marine Le Pen et de Jordan Bardella s’est en effet maintes fois prononcé en faveur de l’État hébreu depuis le 7 octobre, tandis que La France insoumise a pris fait et cause pour les Palestiniens de la bande de Gaza.
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